Lors de l'assemblée générale du Toit Commun, le 16 mai 2024, une part importante des travaux était consacrée au projet politique et stratégique du Toit Commun, avec la perspective de mettre en œuvre, en 2025, une initiative forte, placée sous le signe d'un territoire ESS à l'offensive.
Nous reproduisons ici l'introduction à cette séance de travail, avant les 5 travaux de groupes thématiques qui se sont ensuivi, avec une double déclinaison :
poursuivre la réflexion
pratiquer de manière concrète, au sein du Toit Commun, au sein de nos organisations ESS, à l'occasion d'un temps fort collectif et public en 2025
Il y a nos propres termes, tels que nous les employons dans nos présentations et documentations :
construire l'économie de demain
inventer de nouvelles pratiques économiques
des valeurs politiques, sociales, démocratiques, humanistes
etc. ....
De là, qu'y a-t-il derrière ces termes, comment les rendre effectifs, concrets ?
l'autre économie, classique, traditionnelle, capitaliste : on peut de nouveau, aujourd'hui, nommer et désigner le capitalisme, sans rougir, sans que ça apparaisse archaïque, si ne n'est obscène. Ça n'a pas été le cas pendant des années
en permanence on a une illustration de ce que c'est que cette économie. À titre d'exemple, cette semaine de l'AG, c'est le sommet Choose France, réunion des grands patrons internationaux autour d'Emmanuel Macron, à Versailles. On y annonce 15 milliard d'euros d'investissements, avec, en toile de fond, le fait que la France reste le pays européen le plus attractif pour les investisseurs ! mais il s'agit là d'un forum pro-business, autrement dit tourné vers la satisfaction des actionnaires...
l'autre réalité, c'est que rien ne semble arrêter les ravages de la logique du capital. De plus en plus de gens sont prisonniers d'une existence faite de bas salaires, de travail temporaire, d'économie informelle, ...
on peut prendre un par un tous les secteurs de la vie quotidienne : la santé, le logement, l'alimentation, la culture, l'éducation, les transports, l'information, etc. Les constats sont partout les mêmes : c'est la dégradation, ce sont les manques de moyens
il y a donc nécessité de changer d'orientation...
C'est aussi le bon moment pour promouvoir autre chose parce que des forces existent, en dehors de nous, pour incarner une volonté de changement. On peut notamment se référer :
aux mobilisations des Gilets Jaunes
aux mobilisations des jeunes pour le climat
aux mobilisations dans les universités (pour Gaza)
aux mouvements des femmes
Il ne s'agit pas de dire qu'il y a un raz-de-marée, mais il y a, de façon éparse, des gens, des organisations, qui disent NON, et qui veulent du changement.
À nous de nous en rapprocher, de nous en emparer...
Cela fait maintenant 3 ans que notre SCIC a été créée, et 2 ans que nous avons ouvert notre maison de l'ESS. Avec cet objectif central : rompre avec les fondements de l'économie classique, traditionnelle, conventionnelle, capitaliste, et préfigurer ce que devrait être une autre économie, dans une autre société.
Il nous semble que nous avons aujourd'hui les moyens de cette ambition :
nous avons clarifié ce que recouvre l'Économie Sociale et Solidaire, et nous avons fait un choix explicite : une ESS de réparation est nécessaire, du fait des dégâts sociaux et environnementaux causés par le mode de production capitaliste, mais elle n'est pas suffisante. Elle doit s'accompagner d'une dimension "ESS de résistance et de proposition". Par contre, nous refusons de nous inscrire dans une ESS qui vise à se fondre dans l'économie dominante, en y ajoutant une pincée de valeurs éthiques
Le Toit Commun représente aujourd'hui une vraie force, bien implantée sur son territoire, avec de nombreux sociétaires, organisations de l'ESS du bassin minier et personnes physiques. Nous faisons un travail de fond avec les collectivités (CF notre contribution au projet de territoire de la Communauté d’Agglomération de Lens- Liévin). Il est désormais possible d'envisager une prochaine étape, faite d'initiatives collectives revendicatives, constructives, et, surtout, réellement transformatrices. C'est le bon moment !
2014/2024 : 2024 c'est les 10 ans de la loi ESS. Nous avons d'ailleurs un groupe de travail interne chargé de rédiger un texte à poposer à ESS France
points de vigilance : de même qu'il y a du greenwashing, il existe de l'ESS washing. CF à titre d'exemple les banques qui s'emparent de la qualité d'entreprise à mission !
on peut également pointer une forte dépolitisation concernant les enjeux de l'ESS (CF l'engouement pour les Tiers-lieux, en les vidant de tout contenu émancipateur, transformateur...)
Utilité sociale :
ce qu'on vise, comme changements économiques et sociaux
Organisation collective :
toute l'économie classique est tournée vers l'atomisation des acteurs, et notamment des travailleuses et travailleurs. L'atomisation l'emporte sur la coopération.
l'ESS que nous promouvons est adossée à une forte dimension collective
Gouvernance démocratique :
il s'agit de la vie démocratique
la réalité dominante : les travailleuses et travailleurs ne s'identifient plus à leur activité, n'en tirent aucune fierté. Il existe même un ressentiment anti-travail.
les travailleuses et travailleurs ne sont plus sujets, mais objets de la gestion (et du contrôle)
que fait-on de ça, dans nos organisations, dans nos réseaux ESS ?
Lucrativité limitée :
ça dit bien ce que ça veut dire : on parle des écarts de salaires
mais, de manière sous-jacente, il y a également la question de la propriété des moyens de production : les propriétaires des moyens de production détiennent également le pouvoir politique
se pose donc la question de l'appropriation collective des moyens de production
Il s'agit des travaux de groupes thématiques, mis en œuvre suite à la présentation ci-dessus. Nous en produirons prochainement le compte-rendu.